Je suis toujours décontenancé par la naïveté et la crédulité des gens qui se laissent berner par les offres alléchantes et les publicités souvent mensongères des vendeurs d’épilation-laser de tout acabit.
Depuis quelques années, on assiste à une prolifération effrénée de centres offrant des services d’épilation-laser, que ce soit dans des racoins déguisés en salle de soins au fin fond d’un salon de coiffure ou dans des contextes franchisés aux allures pseudocliniques.
On a tellement banalisé cette procédure que c’est devenu tout à fait naturel d’accepter qu’elle soit souvent offerte dans des endroits plus ou moins douteux où le contrôle de la qualité est inadéquat, où les soins sont offerts par du personnel incompétent, où les complications sont mal gérées ou carrément ignorées, et où la rentabilité passe avant la satisfaction des clients.
Il m’arrive régulièrement de voir des patients ayant eu de mauvaises expériences dans des centres reconnus d’épilation-laser et me consultant pour que je traite des brulures de deuxième degré, des taches brunes persistantes ou des décolorations de la peau, toutes secondaires à des traitements inadéquats. Puisque, dans la tête des clients, l’épilation-laser est maintenant considérée comme une routine sans risques, ça ne surprendra personne de savoir que la grande majorité de ces centres n’ont pas de personnel médical sur place pour répondre aux complications possibles et prescrire les soins nécessaires. Une patiente brulée au deuxième degré dans un de ces endroits suspects m’a déjà dit qu’on lui avait suggéré d’appliquer des compresses d’eau d’hamamélis sur ses brulures. C’est peut être adéquat pour une inflammation légère mais tout à fait insuffisant pour une lésion cutanée plus profonde!
Selon les organismes de contrôle, comme Santé Canada et le FDA (Food and Drug Administration) de nos voisins du sud, les lasers pour épilation-laser font partie de la classe IV dans la classification établie en fonction des risques possibles. La classe IV est la plus dangereuse à cause des dommages permanents aux yeux et à la peau que ces lasers peuvent infliger lorsque utilisés sans les compétences nécessaires.
Même les appareils à lumière pulsée ou IPL, de plus en plus populaires en épilation-laser, sont répertoriés dans la classe IIIb. Ils sont peut être moins puissants que les vrais lasers mais ils présentent à peu près les mêmes risques que le classe IV au niveau de la peau et des yeux. Puisqu’ils sont perçus à tort comme moins dangereux, ils procurent aux utilisateurs un faux sentiment de sécurité!
À mon avis, les lasers et autres appareils à énergie lumineuse, comme les IPL, devraient être considérés comme des appareils à usage médical exclusif et être disponibles seulement dans des centres où un médecin qualifié assume la responsabilité et la supervision des traitements.
J’apparente ces traitements à des actes médicaux qui peuvent être délégués à du personnel qualifié et familier avec les lois de la physique des lasers, qui soit capable de reconnaitre les moindres signes de complications et d’orienter les patients vers les ressources médicales sur place pour une prise en charge immédiate.
Tant que les organismes de contrôle, comme Santé Canada, et les ordres professionnels, comme le Collège des médecins du Québec, n’auront pas réalisé les risques pour la santé publique que représente l’usage anarchique et sans encadrement de ces appareils à haut risque, nous continuerons à recevoir dans nos cliniques des patients ayant vécu des expériences horribles et les laissant parfois avec des séquelles permanentes.
Nos amis américains ont commencé à se réveiller face aux complications croissantes en rapport avec l’épilation-laser et plusieurs états imposent maintenant que l’usage des lasers soit confié exclusivement à des médecins qualifiés.
À quand une législation aussi robuste ici chez nous?
Devons-nous attendre que les dérapages soient de plus en plus fréquents ou que les complications soient de plus en plus graves pour enfin réaliser le danger que représente le manque d’encadrement et le chaos actuel qui existe chez nous?